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Haricot (le)
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Raconté en patois par Catherine Abus, de Ramecourt. ==Texte intégral== Il y avait une fois un homme appelé Jean-Pierre, qui avait beaucoup d'enfants et qui était obligé de travailler dur pour arriver à pouvoir les nourrir. Un jour il rencontra un vieux mendiant presque nu qui lui demanda l'aumône. Ému de pitié à la vue du pauvre minable, il lui donna le seul sou qui lui restait. Pour le remercier, celui-ci lui fit cadeau d'un haricot gros comme il n'en avait jamais vu et lui recommanda de le planter dans les cendres chaudes de son foyer. Rentré chez lui, Jean-Pierre planta le haricot dans l'âtre de la cheminée. Il fut bien étonné de le voir germer aussitôt, puis grandir, s'enrouler autour de la crémaillère, monter dans la cheminée, dépasser le buhot<ref>Partie d'une cheminée qui dépasse le toit.</ref> et enfin devenir gros comme un arbre et s'élever jusqu'au ciel. L'hiver venu, ne sachant plus que faire afin de gagner l'argent nécessaire pour nourrir ses enfants, Jean-Pierre s'imagina de grimper le long de la tige de son haricot. Il arriva à la porte du Paradis.<br/> « Pan ! Pan !<br/> — Qui est-là ? lui demanda Saint Pierre.<br/> — C'est Jean-Pierre, qui a une ribambelle d'enfants et qui vient vous demander de quoi les nourrir.<br/> — Je sais que tu es un brave homme. Tiens, prend cette serviette tu n'auras qu'à la poser sur la cable en disant : Qu'il vienne ici bouilli, rôti, café et pousse-café !<br/> — Merci, Saint Pierre ». La nourriture vint en effet en abondance comme l'avait dit Saint-Pierre, et les enfants se gavèrent comme jamais ils ne l'avaient fait. Et ça recommença ainsi tous les jours. Mais une fois Jean-Pierre entra dans le cabaret voisin pour prendre une chope de bière.<br/> « Tu vis bien, maintenant, Jean-Pierre, lui dit la cabaretière; tu as sans doute trouvé un trésor ?<br/> — Noufait, noufait », lui répondit Jean-Pierre. Et il raconta à la cabaretière ce qu'il lui était arrivé. Il lui mit même la serviette en main. Mais il ne s'aperçut pas que la rusée commère, qui en avait de pareilles, lui changea la sienne avant de la lui rendre. Il eut beau ensuite l'étendre sur la table et lui dire : Qu'il vienne ici bouilli, rôti, café et pousse-café ! il ne vint plus rien du tout. Désolé, il grimpa de nouveau le long de son haricot et refrappa à la porte du Paradis.<br/> « Pan ! Pan !<br/> — Qui est-là ?<br/> — C'est Jean-Pierre qui a une ribambelle d'enfants et qui vient vous demander de quoi les nourrir.<br/> — Ah ! c'est toi, dit Saint Pierre. Tu as été sans doute au cabaret, je vois ça. C'est égal, cette fois-ci je vais te donner encore quelque chose. Prends ce baudet qui ch... des louis d'or. Tu n'auras qu'à étendre un lincheux<ref>Drap de lit.</ref> derrière lui quand il aura envie.. Mais surtout ne reviens plus ici !<br/> — Merci, Saint Pierre ». Rentré chez lui, il fit ce que le saint lui avait dit et recueillit tellement de pièces d'or qu'il dut aller emprunter le boisseau de la cabaretière pour les mesurer, au lieu de s'amuser à les compter. Quand il reporta le boisseau, la cabaretière lui dit :<br/> « Ah diable ! Jean-Pierre, tu mesures souvent de ce grain-là ? »<br/> Et elle lui montra un louis d'or qui était resté entre le bois et un cercle du boisseau. Jean-Pierre lui raconta l'origine de sa fortune.<br/> « Allons, voisin, lui dit alors la cabaretière. je vais te payer un fort café, mais tu iras chercher ton baudet et tu le feras ch... ici dedans.<br/> — Je veux bien, voisine ».<br/> Comme ainsi fut fait. Le baudet ch... des louis d'or quand il eu envie. Mais les nombreuses rinchurettes qui suivirent le café firent leur effet : Jean-Pierre s'endormit sur une table. Et pendant ce temps, la cabaretière emmena le baudet et en mit à sa place un autre tout pareil. Jean-Pierre fut encore une fois attrapé : au lieu de louis d'or, son baudet ne donna plus que des crottes. Malgré la défense de Saint Pierre, notre homme risqua encore une fois l'ascension de son haricot et remonta au Paradis.<br/> « Pan ! Pan !<br/> — Qui est-là ?<br/> — C'est Jean-Pierre, qui a une ribambelle d'enfants et qui vient vous demander de quoi les nourrir.<br/> — Ah ! c'est encore toi ! Je vois sans peine que lu as encore été au cabaret. Tu dois voir à les dépens que les femmes sont plus malignes que toi. Je vais te faire un dernier don, car désormais je n'ouvrirai plus, si jamais lu reviens. La cabaretière a changé ta serviette et ton baudet : Prends ce bâton, et vas les lui redemander. Si elle ne veut pas te les rendre, tu diras : Rindon<ref>Parement, gros bâton de fagot.</ref> d'fagot, fais ton devoir. Tu verras ce qui arrivera.<br/> — Merci, Saint Pierre ». Sitôt descendu, Jean-Pierre court avec sa trique chez la cabaretière.<br/> « C'est pas tout ça, voisine, lui dit-il, vous allez maintenant me rendre ma serviette et mon baudet.<br/> — Je n'ai rien à toi.<br/> — Vous n'avez rien à moi ?<br/> — Non, mille fois non.<br/> — Une fois ! Deux fois ! Trois fois !<br/> — Non, non !<br/> — Eh bien alors, Rindon d'fagot, fais ton devoir! »<br/> Aussitôt le bâton se mit à tricoter les côtes de la cabaretière de la belle manière.<br/> « Jean-Pierre, Jean-Pierre, arrête donc ton bâton !<br/> — Rendez-moi ma serviette et mon baudet.<br/> — Je ne les ai pas.<br/> — Eh bien alors, Rindon d'fagot, fais ton devoir ! »<br/> Et le bâton tricota de plus belle les côtes de la cabaretière.<br/> « Ayèyè ! cria-t-elle, ayèyè ! Je vais te les rendre, Jean-Pierre.<br/> Arrête ton bâton ! » Jean-Pierre arrêta son bâton et ramena chez lui sa serviette et son baudet. Depuis lors, il vécut heureux avec sa ribambelle d'enfants et il ne leur manqua plus jamais rien. ==Notes== <references/> [[Catégorie:Conte merveilleux]] [[Catégorie:AT 0563]] [[Catégorie:Contes du pays de Saint-Pol]]
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