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'''L'enfant sans tête''', conte du Laos collecté par Paul Neis et publié dans la ''Revue des Traditions Populaires'' n° 3-3. ==Texte intégral== Un pauvre homme qui cultivait des rizières à Vien Chan eut un fils qui n'avait pas de tête. Malgré cette triste infirmité il grandit, il mangeait même beaucoup et devint plus intelligent que les enfants de son âge. Le père était obligé de travailler bien dur pour le nourrir. Un soir qu'il avait beaucoup labouré sa rizière, Pha-In, le grand ange vert, chef des anges, vint le trouver et lui demanda combien de mottes de terre il avait retournées dans la journée; le père resta interdit et ne sut que répondre ; le lendemain et le surlendemain Pha-In revint faire la même demande, mais le pauvre homme ne put lui répondre. Chaque jour il revenait bien triste chez lui, enfin le troisième jour, sa femme lui dit :<br/> — Mais qu'as-tu donc, mon pauvre homme, depuis trois jours tu es bien triste ?<br/> — Nous allons avoir de grands malheurs, voici trois fois que Pha-In vient le soir, quand j'ai fini ma journée, me demander combien de mottes de terre j'ai retournées depuis le matin et je ne sais que lui répondre, il reviendra encore demain, mais je ne puis pas compter toutes les mottes de terre que je retourne.<br/> — Oh ! dit l'enfant, qui était couché mais qui ne dormait pas et qui entendait causer ses parents, si j'avais été là j'aurais bien su répondre à Pha-In ; emmenez-moi avec vous à la rizière demain et je lui répondrai.<br/> — Veux-tu te taire, vilain sot, et t'endormir bien vite au lieu d'écouter ce que nous disons, lui répondit le père; voyez-vous cet enfant sans tête qui veut en savoir plus que son père !<br/> — C'est vrai, dit la mère, cet enfant dit des sottises, mais emmène-le quand même demain avec toi à la rizière, peut-être pourra-t-il compter les mottes de terre. Le lendemain l'enfant sans tête alla avec son père à la rizière, mais au lieu de s'occuper à compter les mottes de terre il s'endormit tranquillement sur le talus.<br/> — Quel mauvais enfant, disait le père, il ne pourra pas répondre à Pha-In. Le soir venu Pha-In arriva à cheval comme les jours précédents et fit sa même question. L'enfant sans tête lui dit :<br/> — Attendez un peu, c'est moi qui vais vous répondre.<br/> — Je ne te parle pas, mauvais gamin, lui dit Pha-In, j'ai affaire aux hommes et pas aux petits enfants.<br/> — Mais cet homme est mon père, et le fils peut bien répondre pour le père.<br/> — Je le veux bien, réponds-moi donc : combien ton père a-t-il retourné de mottes de terre dans la journée.<br/> — Mais, dit l'enfant sans tête, vous êtes venu à cheval, dites-moi avant combien votre cheval a fait de pas pour venir ici ?<br/> — Voilà un enfant bien intelligent, se dit Pha-In, je n'en trouverai pas un semblable.<br/> Et il l'adopta, l'emmena avec lui au ciel et débarrassa ainsi le père de cet enfant qui mangeait tant que le pauvre homme pouvait à peine travailler assez pour le nourrir. ==Note du collecteur== Ce récit m'a été fait par le Phra-Penom, mandarin siamois, envoyé il y a dix ans à Non-Kay pour faire la guerre aux Hôs qui avaient envahi Vien-Chan, violé les tombeaux des rois, démoli les phra tia-di, les grandes statues de Bouddha, pour voler les matières d'or et d'argent qui y étaient cachées et qui voulaient en outre s'établir dans les riches rizières de Vien-Chan. Il a été chargé par le roi de Siam de réunir sur la ville de Vien-Chan tous les documents qu'il pourrait trouver, il a lu bien des vieux manuscrits, des pages dont malheureusement les Hôs out brûlé la plus grande partie, il a déchiffré les inscriptions et a beaucoup interrogé les anciens du pays pour recueillir les traditions et les souvenirs puisque la ruine de Vien-Chan ne remonte qu'à 56 ans (1827) et voici ce qu'il m'a raconté : Je conserve le plus possible à la traduction littérale sa naïveté. [[Catégorie:Revue des Traditions Populaires, année 1888]] [[Catégorie:Laos]]

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