Jean de L'ours - Version Normande

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<p>JEAN DE L'OURS - Version Normande</p>
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JEAN DE L'OURS - Version Normande
<p>Autrefois (il y a si longtemps qu'on ne sait pas au juste
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&agrave; quelle &eacute;poque ) il existait dans notre pays un
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Autrefois (il y a si longtemps qu'on ne sait pas au juste à quelle époque ) il existait dans notre pays un géant qui passait pour l'homme le plus fort de toute la terre. Dans ses voyages, il avait coutume de se servir d'un tronc d'arbre en guise de bâton, et on ne connaissait que sous le nom de Jean de l'Ours qu'il devait sans doute à ses prouesses étonnantes et à sa force extraordinaire.
g&eacute;ant qui passait pour l'homme le plus fort de toute la
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terre. Dans ses voyages, il avait coutume de se servir d'un tronc
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Un jour, en chassant dans une forêt, il fit rencontre d'un homme de sa taille, qui jouait au palet avec des meules de moulin. « Tiens, qu'il lui dit, te voilà ? toi ! Je m'croyais le plus fort du monde, et pourtant ta force surpasse la mienne ! Eh bien, viens avec moi, à nous deux j'pourrons nous défendre si j'somme attaqués ! »
d'arbre en guise de b&acirc;ton, et on ne connaissait que sous le
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nom de Jean de l'Ours qu'il devait sans doute &agrave; ses
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En marchant ensemble dans la forêt, ils rencontrèrent un autre colosse qui teurdait des chênes pour se faire des harts. Jean de l'ours lui dit : « Tiens, te voilà ? toi ! j'nous croyions tous les deux les plus forts du monde, et tu es encore plus fort que nous. Viens avec nous, à nous trois j'pourrons nous défendre si j'sommes attaqués !
prouesses &eacute;tonnantes et &agrave; sa force extraordinaire.</p>
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<p>Un jour, en chassant dans une for&ecirc;t, il fit
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Les voilà partis tous les trois, mais, tout en marchant, et devisant pour faire mieux connaissance, ils se trouvèrent ennuités dans la forêt. La nuit devint tellement noire qu'il perdirent leur chemin.
rencontre d'un homme de sa taille, qui jouait au palet avec des meules
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de moulin. &laquo; Tiens, qu'il lui dit, te voil&agrave; ? toi
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Jean de l'Ours dit à celui qu'il avait trouvé occupé à jouer au palet avec des meules de moulin : « Monte sur un arbre, et regarde si tu vas voir de la lumière queuque part. » Cet homme étant monté au haut d'un chêne, dit à ses compagnons : « Je vois une lumière, mais très loin, très loin ! - Eh bien, reprit Jean de l'Ours, fais bien attention de quel côté, pour nous y diriger. »
! Je m'croyais le plus fort du monde, et pourtant ta force surpasse la
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mienne ! Eh bien, viens avec moi, &agrave; nous deux j'pourrons
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Guidés par celui qui avait aperçu cette lumière, ils se remirent en route ; après avoir marché quelque temps, ils arrivèrent à un château où ils demandèrent à passer la nuit.
nous d&eacute;fendre si j'somme attaqu&eacute;s ! &raquo;</p>
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<p>En marchant ensemble dans la for&ecirc;t, ils
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Le seigneur leur dit : « J'ai , tout près d'ici, un vieux château abondonné que personne ne veut habiter parce qu'on croit qu'il y a des revenants. Si vous voulez vous y loger, je vous en donne la permission. - Nous voulons bien, dit Jean de l'Ours, moyennant que vous nous donniez ce que j'vas demander. Donnez-nous une torche pour nous éclairer, un bénitier contenant de l'eau bénite et un goupillon.
rencontr&egrave;rent un autre colosse qui teurdait des
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ch&ecirc;nes pour se faire des harts. Jean de l'ours lui dit :
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Dès qu'ils furent munis de ces objets, ils partirent tous les trois vers le château hanté, accompagnés d'un serviteur chargé de les y conduire. A peine arrivés, ils le renvoyèrent, allumèrent la torche et parcoururent les principales pièces de ce château qu'ils trouvèrent meublées comme si on avait l'habitude d'y séjourner, ce qui les surprit beaucoup. Ils ne furent pas moins étonnés de voir l'office garni de diverses provisions de bouche comme si des hôtes y étaient attendus. Alors Jean de l'Ours, qui avait chassé toute la journée et qui avait tué beaucoup de gibier, dit à celui qu'il avait trouvé le premier, jouant au palet avec des meules de moulin : « Tu vas nous faire cuirent à souper, mais tu ne prendras dans l'office que ce qui nous est indispensable. Pendant ce temps, nous autres, nous allons faire une excursion autour du château, afin que personne ne vienne nous déranger. » N'ayant rien vu de suspect, ils rentrèrent bientôt et se mirent à jouer aux cartes tous les deux.
&laquo; Tiens, te voil&agrave; ? toi ! j'nous croyions tous les
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deux les plus forts du monde, et tu es encore plus fort que nous. Viens
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Quand le souper fut cuit, celui qui l'avait préparé dit : « Le souper est prêt. - Eh bien, répondit Jean de l'Ours, serre tout ça dans le buffet, et après, tu vas aller nous tirer du vin. » Quand cet homme arriva dans la cave pour avoir du vin, il y trouva un petit ver de terre qui lui barra le passage en disant : « Tu bois mon vin, tu manges mon pain, et tu n'm'inviterais pas seulement à en manger ma part ? » Puis le petit ver battit si fort le géant que celui-ci fut obligé de s'en revenir sans tirer du vin. Ses camarades, auxquels il conta son aventure, se moquèrent de lui.
avec nous, &agrave; nous trois j'pourrons nous d&eacute;fendre
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si j'sommes attaqu&eacute;s !</p>
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Jean de l'Ours dit à celui qui avait teurt des chênes pour se faire des harts : « Va, toi, nous tirer du vin ! » Ce dernier s'empressa d'y aller, mais quand il entra dans la cave, il trouva le petit ver qui répéta ces paroles : « Tu bois mon vin, tu manges mon pain, et tu n'm'inviterais pas seulement à en manger ma part ? » En même temps le petit ver battit si fort le second géant qu'il revint aussi sans tirer du vin.
<p>Les voil&agrave; partis tous les trois, mais, tout en
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marchant, et devisant pour faire mieux connaissance, ils se
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Surpris de leur échec, Jean de l'Ours dit à ses compagnons : « J'vous croyais forts, mais vous ne l'êtes pas. C'est à mon tour d'aller tirer le vin. » Arrivé à la cave, il y trouva le petit ver de terre qui lui dit comme aux autres : « Tu bois mon vin, tu manges mon pain, et tu n'm'inviterais pas seulement à en manger ma part ? » Mais Jean de l'Ours, en entendant ces mots, dégaîna son sabre et coupa le petit ver en deux. Puis il tira du vin, remonta vers ses compagnons et leur dit : « Vous voyez bien que je suis plus fort que vous ! »
trouv&egrave;rent ennuit&eacute;s dans la for&ecirc;t. La
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nuit devint tellement noire qu'il perdirent leur chemin.</p>
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S'adressant alors à celui qui avait fait la cuisine : « Tu vas, lui dit-il, m'apporter sept fagots de bois et les mettre dans la cheminée. Tu vas ensuite, prendre sept bottes de foin, les tremper dans l'eau et les mettre par dessus. » Au moment cet homme venait de placer la dernière botte, le diable descendit par la cheminée avec tous ses petits diablotins, qui se dispersèrent en un instant dans la cuisine.
<p>Jean de l'Ours dit &agrave; celui qu'il avait
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trouv&eacute; occup&eacute; &agrave; jouer au palet avec
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Jean de l'Ours, sans se troubler, commanda à ses compagnons de mettre le feu aux fagots. Dès qu'ils commencèrent à flamber, il prit le bénitier et aspergea avec son goupillon de tous les côtés. Les diables atteints par l'eau bénite, coururent vers la cheminée pour la remonter, mais il la trouvèrent remplie d'une fumée si épaisse et si aveuglante qu'ils ne purent se sauver assez vite pour échapper à une nouvelle et terrible aspersion que leur administra Jean De l'Ours. Ils disparurent enfin en poussant des cris épouvantables.
des meules de moulin : &laquo; Monte sur un arbre, et regarde si tu
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vas voir de la lumi&egrave;re queuque part. &raquo; Cet homme
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Après le départ des diables, les trois compagnons soupèrent gaiement, se couchèrent et passèrent une nuit fort paisible. Le lendemain, ils allèrent retrouver le seigneur du château et lui rapportèrent ce qui leur avait prêté. Ce dernier fut bien surpris de les retrouver vivants. Il leur dit : « Puisque vous êtes si forts et que vous avez pu passer paisiblement la nuit dans un château enchanté, je vais vous demander un grand service. J'ai mes trois demoiselles victimes d'un génie malfaisant qui les tient enfermées dans une carrière inaccessible, je voudrais bien que vous me les délivriez. Si vous y parvenez, je vous les accorderai en mariage. - Eh bien, dit Jean de l'Ours, nous essayerons. »
&eacute;tant mont&eacute; au haut d'un ch&ecirc;ne, dit
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&agrave; ses compagnons : &laquo; Je vois une
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Les trois géants se rendirent à la carrière, en parcoururent les bords, mais ne purent en apercevoir le fond. Ils y jetèrent de grosses pierres, espérant, par la durée de leur chute, en évaluer approximativement la profondeur. Mais ce fut vainement qu'ils écoutèrent : aucun bruit ne parvint à leurs oreilles.
lumi&egrave;re, mais tr&egrave;s loin, tr&egrave;s loin ! -
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Eh bien, reprit Jean de l'Ours, fais bien attention de quel
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Loin de se décourager ils se mirent à tresser de la corde. Ils en tressèrent pendant sept années. Au bout de ce temps, ils pensèrent posséder une corde assez longue pour descendre jusqu'au fond de la carrière.
c&ocirc;t&eacute;, pour nous y diriger. &raquo;</p>
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<p>Guid&eacute;s par celui qui avait aper&ccedil;u cette
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Alors Jean de l'Ours dit à celui qu'il avait trouvé jouant au palet avec des meules de moulin. « Descends le premier, toi ; voilà une sonnette, si tu te trouves embarrassé, tu la feras tinter et on te remontera » Obéissant à cet ordre, l'homme se laissa descendre. Il était déjà arrivé à une très grande profondeur, quand tout à coup, sortant d'une sorte de caverne creusée dans les parois du précipice, une bête difforme, hideuse, effroyable, se présenta pour l'arrêter. Le corps de cette bête, recouvert d'écailles d'un aspect sinistre, était surmonté de sept têtes aux gueules menaçantes. Saisi d'épouvante et n'osant s'attaquer à pareil monstre, l'homme sonna de toutes ses forces et aussitôt ses compagnons le remontèrent.
lumi&egrave;re, ils se remirent en route ; apr&egrave;s avoir
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march&eacute; quelque temps, ils arriv&egrave;rent &agrave;
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Alors Jean de l'Ours s'adressant à celui qu'il avait trouvé teurdant des chênes pour se faire des harts, dit : « C'est à toi de descendre ». Muni de la sonnette, celui-ci disparut à son tour. Arrivé à la même profondeur que son compagnon, la bête aux sept têtes se présenta pour lui barrer le passage. Saisi d'épouvante, il agita éperdument la sonnette aussitôt ses compagnons le remontèrent.
un ch&acirc;teau o&ugrave; ils demand&egrave;rent
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&agrave; passer la nuit.</p>
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Jean de l'Ours dit alors : « Je vous croyais bien forts tous les deux, mais je vois bien que vous l'êtes moins que moi, car vous n'avez pas pu tirer de vin et j'en ai tiré ; maintenant vous ne pouvez descendre dans cette carrière. C'est donc à moi d'y allez . Quand je ferai tinter la sonnette, ne manquez pas de remonter la corde et de la redescendre ensuite jusqu'à ce que je sois revenu, car si vous y manquiez, vous seriez punis de mort ».
<p>Le seigneur leur dit : &laquo; J'ai l&agrave;, tout
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pr&egrave;s d'ici, un vieux ch&acirc;teau abondonn&eacute;
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Jean de l'Ours descendit à son tour. Arrivé au même point que ses compagnons il aperçut la bête à sept têtes. D'un coup de sabre il lui abattit une tête et continua sa descente ; mais la bête se retrouva bientôt devant lui. D'un deuxième coup de sabre, il lui abattit une autre tête et descendit encore. La bête se présentant une troisième fois, il lui fit sauter une troisième tête. La même apparition se reproduisit encore trois fois à des intervalles de moins en moins rapprochés, mais chaque fois Jean de l'Ours lui abattait une tête. Il approchait du fond de la carrière lorsque le monstre, dont l'aspect était rendu plus horrible par le sang qui découlait de ses plaies, tenta un suprême effort. Un vigoureux coup de sabre fit rouler la dernière tête du dragon.
que personne ne veut habiter parce qu'on croit qu'il y a des revenants.
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Si vous voulez vous y loger, je vous en donne la permission. - Nous
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L'audacieux géant put enfin toucher le fond du précipice.
voulons bien, dit Jean de l'Ours, moyennant que vous nous donniez ce
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que j'vas demander. Donnez-nous une torche pour nous
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Il y aperçut alors trois cabinets dont l'entrée était gardée par un grand vieillard à barbe blanche dont les yeux lançaient des éclairs.
&eacute;clairer, un b&eacute;nitier contenant de l'eau
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b&eacute;nite et un goupillon.</p>
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Jean de l'Ours se présentant devant le premier cabinet dit à l'étrange vieillard : « Qu'est-ce que tu fais , toi ?- Qu'est-ce que ça t'regarde toi ? lui fut-il répondu - Ouvre la porte ou je la défonce ! - Défonce-la si t'ose ! » dit le gardien en se plaçant en travers.
<p>D&egrave;s qu'ils furent munis de ces objets, ils
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partirent tous les trois vers le ch&acirc;teau hant&eacute;,
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Jean de l'Ours, sans se laisser intimider, défonça la porte avec la poignée de son sabre. Au même instant, une belle demoiselle sortit ; Jean de l'Ours l'embrassa, lui prit son mouchoir de poche et la fit remonter au moyen du signal convenu.
accompagn&eacute;s d'un serviteur charg&eacute; de les y
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conduire. A peine arriv&eacute;s, ils le renvoy&egrave;rent,
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Le vieillard s'adossa alors contre la deuxième porte. Jean de l'Ours, se tournant de nouveau vers lui, s'écria : « Pourquoi te places-tu devant cette porte ? - Qu'est-ce que ça te regarde ? - Ouvre-la ou je la défonce ! - Défonce-la s'y t'ose ! » répondit encore le gardien d'une voix menaçante.
allum&egrave;rent la torche et parcoururent les principales
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pi&egrave;ces de ce ch&acirc;teau qu'ils trouv&egrave;rent
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Jean de l'Ours, avec la poignée de son sabre, ouvrit le deuxième cabinet et au même instant une belle demoiselle en sortit. Le géant l'embrassa, lui prit son mouchoir, et la fit remonter comme sa soeur.
meubl&eacute;es comme si on avait l'habitude d'y
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s&eacute;journer, ce qui les surprit beaucoup. Ils ne furent pas
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Avançant vers le troisième cabinet, devant lequel le vieillard venait de s'adosser, Jean de l'Ours dit encore à celui-ci « Qu'est-ce que tu fais ? » Puis après une nouvelle sommation suivie d'une dernière menace, le géant défonça la porte. Il sortit une troisième demoiselle aussi belle que les premières. Après l'avoir embrassée, son sauveur lui prit son mouchoir et la fit remonter comme ses deux soeurs.
moins &eacute;tonn&eacute;s de voir l'office garni de diverses
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provisions de bouche comme si des h&ocirc;tes y &eacute;taient
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Quant au vieillard, qui n'était autre probablement que le génie malfaisant qui tenait en captivité les filles du seigneur, il était disparu comme par enchantement.
attendus. Alors Jean de l'Ours, qui avait chass&eacute; toute la
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journ&eacute;e et qui avait tu&eacute; beaucoup de gibier, dit
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Jean de l'Ours ayant achevé sa mission eut hâte de sortir de ce gouffre affreux, il agita sa clochette mais il eut beau sonner, la corde ne lui fut pas descendue. Il se trouva donc dans l'impossibilité de sortir de la carrière. Pendant qu'il songeait avec amertume à la trahison de ses deux compagnons, ceux-ci se rendaient au château pour y conduire les trois demoiselles.
&agrave; celui qu'il avait trouv&eacute; le premier, jouant au
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palet avec des meules de moulin : &laquo; Tu vas nous faire cuirent
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Il y avait très longtemps que Jean de l'Ours était abandonné, et il commençait à perdre espoir lorsqu'il aperçut à ses côtés le p'tit ver de terre qui lui dit : « Ah ! te voilà, toi ? - Oui, dit Jean de l'Ours. -Tu voudrais bien que je te remonte, sans doute ! Eh bien, voilà un corbeau ; monte dessus. Voilà aussi sept boeufs ; chaque fois qu'il va crier : coac, tu vas lui en mettre un dans le bec ».
&agrave; souper, mais tu ne prendras dans l'office que ce qui nous
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est indispensable. Pendant ce temps, nous autres, nous allons faire une
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Tout en montant, Jean de l'Ours, plus résolu que jamais à triompher du nouveau péril devant lequel il s'était d'abord senti impuissant, n'oubliait pas la recommandation du p'tit ver, et chaque fois que le corbeau criait : coac, il lui mettait un boeuf dans le bec.
excursion autour du ch&acirc;teau, afin que personne ne vienne nous
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d&eacute;ranger. &raquo; N'ayant rien vu de suspect, ils
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Quand le corbeau eut crié sept fois, Jean de l'Ours, qui n'était pas encore remonté, se dit : Si le corbeau crie encore, je n'ai plus rien à lui mettre dans le bec, et il est capable de me laisser tomber au fond de ce précipice dont j'entrevois maintenant le bord. Alors il se coupa un morceau de chair au mollet, et le corbeau ayant encore crié : coac, il lui mit ce morceau dans le bec. Au même instant, d'un coup d'aile, cet oiseau jeta notre homme sur le bord.
rentr&egrave;rent bient&ocirc;t et se mirent &agrave; jouer
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aux cartes tous les deux.</p>
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Jean de l'Ours, sorti de la carrière, banda son mollet pour étancher le sang de sa plaie et se dirigea en boitant, vers le château du seigneur. En route, il rencontra un mendiant. « As-tu été au château, lui demande-t-il ? -Oui, répondit le mendiant, mais il y a une grande fête, aujourd'hui !- Ah ! dit Jean de l'Ours, il y a une grande fête ? - Oui, car le seigneur marie deux de ses demoiselles. - Eh bien, donne-moi tes habits et prends les miens, car je veux aller demander l'aumône au château ».
<p>Quand le souper fut cuit, celui qui l'avait
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pr&eacute;par&eacute; dit : &laquo; Le souper est
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Le mendiant, tout déguenillé, considérant les habits relativement luxueux de celui qu'il rencontrait, lui demandit : « Mais, monseigneur, vous voulez vous moquer de moi, bien sûr ?- Non, dit Jean de l'Ours, je ne me moque pas de toi ; Tiens, je vais me déshabiller en premier ». Et il donna aussitôt ses habits au mendiant qui, en voyant cela, ne refusa pas de lui céder les siens.
pr&ecirc;t. - Eh bien, r&eacute;pondit Jean de l'Ours, serre
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tout &ccedil;a dans le buffet, et apr&egrave;s, tu vas aller
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Tout en boitant, Jean de l'Ours poursuivit sa route vers le château. En y arrivant, il demanda à entrer dans la cuisine pour se reposer et y panser sa jambe. Mais les servantes et les valets voyant les haillons de ce malheureux, le repoussèrent en lui disant : « Revenez une autrefois car notre seigneur marie ses demoiselles aujourd'hui.- Ah ! Monseigneur marie ses demoiselles, je voudrais bien lui parler, moi ! - Ca n'se peut pas, lui répliqua-t-on, monseigneur est avec sa famille et ses invités, tout occupé de la fête, et il ne va pas quitter sa société pour s'entretenir avec vous. -Eh bien, dit le faux mendiant, conduisez-moi dans sa salle, parce que j'ai absolument besoin de lui parler.- Ca n'se peut pas ! lui fut-il répété encore. Comment voulez-vous qu'on vous présente à monseigneur en ce moment avec votre sale accoutrement et votre piteuse mine ? »
nous tirer du vin. &raquo; Quand cet homme arriva dans la cave pour
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avoir du vin, il y trouva un petit ver de terre qui lui barra le
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Jean de l'Ours, qui commençait à perdre patience, s'écria : «Ah ! vous ne voulez pas me recevoir au château ! Eh bien j'y entrerai malgré vous ! » Voyant son insistance et l'air menaçant qu'il venait de prendre, les serviteurs jugèrent prudent de prévenir leur maître et lui rapportèrent ce qui venait de se passer.
passage en disant : &laquo; Tu bois mon vin, tu manges mon pain, et
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tu n'm'inviterais pas seulement &agrave; en manger ma part ?
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Le seigneur, étonné qu'un malheureux de cette espèce s'entêtât à lui parler, donna ordre de le faire entrer à la cuisine.
&raquo; Puis le petit ver battit si fort le g&eacute;ant que
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celui-ci fut oblig&eacute; de s'en revenir sans tirer du vin. Ses
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Jean de l'Ours alla s'asseoir au coin du feu, étendit, sur chacun de ses genoux, deux des mouchoirs qu'il avait pris aux demoiselles et fixa le troisième sur sa poitrine.
camarades, auxquels il conta son aventure, se moqu&egrave;rent de
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lui.</p>
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A ce moment, les trois demoiselles passèrent ; apercevant le mendiant, elles remarquèrent avec surprise les mouchoirs qu'il avait étalés devant lui. L'une d'elles dit à ses soeurs : « Ce doit être l'homme qui nous a tirées de la carrière, car je reconnais mon mouchoir sur sa poitrine ? » Celles-ci répondirent qu'elles reconnaissaient aussi les leurs. Les compagnons de Jean de l'Ours qui, à la suite des demoiselles, s'étaient introduits dans la cuisine, ressentirent un trouble immense et se dirent l'un à l'autre : Ce doit être lui ! pourtant il est impossible qu'il ait pu sortir du précipice.
<p>Jean de l'Ours dit &agrave; celui qui avait teurt des
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ch&ecirc;nes pour se faire des harts : &laquo; Va, toi, nous
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Alors Jean de l'Ours, qui observait leur attitude, s'écria : « Je crois que vous me reconnaissez, vous autres. Vous savez qu'il nous avait été promis à tous les trois que nous épouserions les filles du seigneur si nous les délivrions de leur captivité. Vous savez que c'est moi seul qui ai pu tirer du vin dans le château abandonné, que c'est encore moi seul qui suis descendu dans la carrière pour délivrer ces demoiselles, car vous étiez incapable de les sauver ; sans moi, elles seraient encore prisonnières au fond du gouffre maudit. Jaloux de ma puissance, vous avez cru que je ne pourrais en sortir sans votre aide, et vous m'avez abandonné lâchement pour profiter seuls de la promesse qui nous a été faite à tous les trois. Me voilà, pourtant, et je viens à mon tour réclamer la récompense que je mérite. Tant pis pour vous, si ce que j'ai à dire à monseigneur le fait renoncer à vous accorder la faveur dont vous êtes indignes ! »
tirer du vin ! &raquo; Ce dernier s'empressa d'y aller, mais quand
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il entra dans la cave, il trouva le petit ver qui
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Le seigneur, qui depuis un instant était entré dans la cuisine, avait entendu tous les reproches que Jean de l'Ours adressait à ses compagnons. Il leur demanda si ce qu'il venait d'apprendre était vrai. Ceux-ci, remplis de confusion et ne sachant quoi répondre pour se justifier de leur crime à l'égard de celui qui avait délivré les demoiselles, ne purent contredire ses déclarations.
r&eacute;p&eacute;ta ces paroles : &laquo; Tu bois mon vin,
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tu manges mon pain, et tu n'm'inviterais pas seulement &agrave; en
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Alors le seigneur, irrité de l'odieuse conduite de ceux qui avaient été sur le point de devenir ses gendres, ordonna à ses serviteurs de les enchaîner et de les jeter dans la carrière, ce qui fut exécuté sans retard. Ayant fait revêtir Jean de l'Ours de magnifiques habits, il lui accorda la main de sa fille aînée. Quant aux deux autres demoiselles elles épousèrent de riches seigneurs des environs qui s'étaient empressés de leur faire la cour.
manger ma part ? &raquo; En m&ecirc;me temps le petit ver
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battit si fort le second g&eacute;ant qu'il revint aussi sans tirer
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Source :
du vin.</p>
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<p>Surpris de leur &eacute;chec, Jean de l'Ours dit
+
Quatre contes populaires recueillis dans le Pays d'Auge par M. Leroy instituteur et publiés en 1902 dans Le Pays normand, revue mensuelle illustrée dirigée par Léon Le Clerc (Honfleur : Imprimerie-Librairie Satie, 12 rue de la République, R. Sescau, successeur).
&agrave; ses compagnons : &laquo; J'vous croyais forts, mais
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Pimpernelle ; La sotte bonne femme ; Les trois bossus ; Jean de l'ours. Saisie du texte et relecture : M. Dubosq pour la collection électronique de la Bibliothèque Municipale de Lisieux (16.XI.2000)
vous ne l'&ecirc;tes pas. C'est &agrave; mon tour d'aller tirer
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Adresse : Bibliothèque municipale, B.P. 27216, 14107 Lisieux cedex
le vin. &raquo; Arriv&eacute; &agrave; la cave, il y trouva
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-Tél. : 02.31.48.66.50.- Minitel : 02.31.48.66.55. - Fax : 02.31.48.66.56
le petit ver de terre qui lui dit comme aux autres : &laquo; Tu
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Mél : bmlisieux@mail.cpod.fr, [Olivier Bogros] bib_lisieux@compuserve.com
bois mon vin, tu manges mon pain, et tu n'm'inviterais pas seulement
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http://www.bmlisieux.com/
&agrave; en manger ma part ? &raquo; Mais Jean de l'Ours, en
+
Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie conservées. Texte établi sur l'exemplaire de la bibliothèque (BmLx : norm 430).
entendant ces mots, d&eacute;ga&icirc;na son sabre et coupa le
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petit ver en deux. Puis il tira du vin, remonta vers ses compagnons et
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leur dit : &laquo; Vous voyez bien que je suis plus fort que vous !
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[[Catégorie: Conte merveilleux]]
&raquo;</p>
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[[Catégorie: AT 0301]]
<p>S'adressant alors &agrave; celui qui avait fait la cuisine
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[[Catégorie: Normandie]]
: &laquo; Tu vas, lui dit-il, m'apporter sept fagots de bois et les
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mettre dans la chemin&eacute;e. Tu vas ensuite, prendre sept bottes
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de foin, les tremper dans l'eau et les mettre par dessus. &raquo;
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Au moment o&ugrave; cet homme venait de placer la
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derni&egrave;re botte, le diable descendit par la
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chemin&eacute;e avec tous ses petits diablotins, qui se
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dispers&egrave;rent en un instant dans la cuisine.</p>
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<p>Jean de l'Ours, sans se troubler, commanda &agrave; ses
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compagnons de mettre le feu aux fagots. D&egrave;s qu'ils
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commenc&egrave;rent &agrave; flamber, il prit le
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b&eacute;nitier et aspergea avec son goupillon de tous les
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c&ocirc;t&eacute;s. Les diables atteints par l'eau
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b&eacute;nite, coururent vers la chemin&eacute;e pour la
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remonter, mais il la trouv&egrave;rent remplie d'une
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fum&eacute;e si &eacute;paisse et si aveuglante qu'ils ne
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purent se sauver assez vite pour &eacute;chapper &agrave; une
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nouvelle et terrible aspersion que leur administra Jean De l'Ours. Ils
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disparurent enfin en poussant des cris &eacute;pouvantables.</p>
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<p>Apr&egrave;s le d&eacute;part des diables, les trois
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compagnons soup&egrave;rent gaiement, se couch&egrave;rent et
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pass&egrave;rent une nuit fort paisible. Le lendemain, ils
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all&egrave;rent retrouver le seigneur du ch&acirc;teau et lui
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rapport&egrave;rent ce qui leur avait pr&ecirc;t&eacute;.
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Ce dernier fut bien surpris de les retrouver vivants. Il leur dit :
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&laquo; Puisque vous &ecirc;tes si forts et que vous avez pu
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passer paisiblement la nuit dans un ch&acirc;teau
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enchant&eacute;, je vais vous demander un grand service. J'ai mes
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trois demoiselles victimes d'un g&eacute;nie malfaisant qui les
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tient enferm&eacute;es dans une carri&egrave;re inaccessible,
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je voudrais bien que vous me les d&eacute;livriez. Si vous y
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parvenez, je vous les accorderai en mariage. - Eh bien, dit Jean de
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l'Ours, nous essayerons. &raquo;</p>
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<p>Les trois g&eacute;ants se rendirent &agrave; la
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carri&egrave;re, en parcoururent les bords, mais ne purent en
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apercevoir le fond. Ils y jet&egrave;rent de grosses pierres,
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esp&eacute;rant, par la dur&eacute;e de leur chute, en
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&eacute;valuer approximativement la profondeur. Mais ce fut
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vainement qu'ils &eacute;cout&egrave;rent : aucun bruit ne
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parvint &agrave; leurs oreilles.</p>
+
<p>Loin de se d&eacute;courager ils se mirent &agrave;
+
tresser de la corde. Ils en tress&egrave;rent pendant sept
+
ann&eacute;es. Au bout de ce temps, ils pens&egrave;rent
+
poss&eacute;der une corde assez longue pour descendre jusqu'au fond
+
de la carri&egrave;re.</p>
+
<p>Alors Jean de l'Ours dit &agrave; celui qu'il avait
+
trouv&eacute; jouant au palet avec des meules de moulin.
+
&laquo; Descends le premier, toi ; voil&agrave; une sonnette,
+
si tu te trouves embarrass&eacute;, tu la feras tinter et on te
+
remontera &raquo; Ob&eacute;issant &agrave; cet ordre,
+
l'homme se laissa descendre. Il &eacute;tait
+
d&eacute;j&agrave; arriv&eacute; &agrave; une
+
tr&egrave;s grande profondeur, quand tout &agrave; coup,
+
sortant d'une sorte de caverne creus&eacute;e dans les parois du
+
pr&eacute;cipice, une b&ecirc;te difforme, hideuse, effroyable,
+
se pr&eacute;senta pour l'arr&ecirc;ter. Le corps de cette
+
b&ecirc;te, recouvert d'&eacute;cailles d'un aspect sinistre,
+
&eacute;tait surmont&eacute; de sept t&ecirc;tes aux
+
gueules mena&ccedil;antes. Saisi d'&eacute;pouvante et n'osant
+
s'attaquer &agrave; pareil monstre, l'homme sonna de toutes ses
+
forces et aussit&ocirc;t ses compagnons le remont&egrave;rent.</p>
+
<p>Alors Jean de l'Ours s'adressant &agrave; celui qu'il
+
avait trouv&eacute; teurdant des ch&ecirc;nes pour se faire des
+
harts, dit : &laquo; C'est &agrave; toi de descendre
+
&raquo;. Muni de la sonnette, celui-ci disparut &agrave; son
+
tour. Arriv&eacute; &agrave; la m&ecirc;me profondeur que
+
son compagnon, la b&ecirc;te aux sept t&ecirc;tes se
+
pr&eacute;senta pour lui barrer le passage. Saisi
+
d'&eacute;pouvante, il agita &eacute;perdument la sonnette
+
aussit&ocirc;t ses compagnons le remont&egrave;rent.</p>
+
<p>Jean de l'Ours dit alors : &laquo; Je vous croyais bien
+
forts tous les deux, mais je vois bien que vous l'&ecirc;tes moins
+
que moi, car vous n'avez pas pu tirer de vin et j'en ai tir&eacute;
+
; maintenant vous ne pouvez descendre dans cette carri&egrave;re.
+
C'est donc &agrave; moi d'y allez . Quand je ferai tinter la
+
sonnette, ne manquez pas de remonter la corde et de la redescendre
+
ensuite jusqu'&agrave; ce que je sois revenu, car si vous y
+
manquiez, vous seriez punis de mort &raquo;.</p>
+
<p>Jean de l'Ours descendit &agrave; son tour.
+
Arriv&eacute; au m&ecirc;me point que ses compagnons il
+
aper&ccedil;ut la b&ecirc;te &agrave; sept t&ecirc;tes.
+
D'un coup de sabre il lui abattit une t&ecirc;te et continua sa
+
descente ; mais la b&ecirc;te se retrouva bient&ocirc;t devant
+
lui. D'un deuxi&egrave;me coup de sabre, il lui abattit une autre
+
t&ecirc;te et descendit encore. La b&ecirc;te se
+
pr&eacute;sentant une troisi&egrave;me fois, il lui fit sauter
+
une troisi&egrave;me t&ecirc;te. La m&ecirc;me apparition
+
se reproduisit encore trois fois &agrave; des intervalles de moins
+
en moins rapproch&eacute;s, mais chaque fois Jean de l'Ours lui
+
abattait une t&ecirc;te. Il approchait du fond de la
+
carri&egrave;re lorsque le monstre, dont l'aspect &eacute;tait
+
rendu plus horrible par le sang qui d&eacute;coulait de ses plaies,
+
tenta un supr&ecirc;me effort. Un vigoureux coup de sabre fit
+
rouler la derni&egrave;re t&ecirc;te du dragon. </p>
+
<p>L'audacieux g&eacute;ant put enfin toucher le fond du
+
pr&eacute;cipice.</p>
+
<p>Il y aper&ccedil;ut alors trois cabinets dont
+
l'entr&eacute;e &eacute;tait gard&eacute;e par un grand
+
vieillard &agrave; barbe blanche dont les yeux lan&ccedil;aient
+
des &eacute;clairs.</p>
+
<p>Jean de l'Ours se pr&eacute;sentant devant le premier
+
cabinet dit &agrave; l'&eacute;trange vieillard : &laquo;
+
Qu'est-ce que tu fais l&agrave;, toi ?- Qu'est-ce que &ccedil;a
+
t'regarde toi ? lui fut-il r&eacute;pondu - Ouvre la porte ou je la
+
d&eacute;fonce ! - D&eacute;fonce-la si t'ose ! &raquo; dit
+
le gardien en se pla&ccedil;ant en travers.</p>
+
<p>Jean de l'Ours, sans se laisser intimider,
+
d&eacute;fon&ccedil;a la porte avec la poign&eacute;e de
+
son sabre. Au m&ecirc;me instant, une belle demoiselle sortit ;
+
Jean de l'Ours l'embrassa, lui prit son mouchoir de poche et la fit
+
remonter au moyen du signal convenu.</p>
+
<p>Le vieillard s'adossa alors contre la deuxi&egrave;me
+
porte. Jean de l'Ours, se tournant de nouveau vers lui,
+
s'&eacute;cria : &laquo; Pourquoi te places-tu devant cette
+
porte ? - Qu'est-ce que &ccedil;a te regarde ? - Ouvre-la ou je la
+
d&eacute;fonce ! - D&eacute;fonce-la s'y t'ose ! &raquo;
+
r&eacute;pondit encore le gardien d'une voix mena&ccedil;ante.</p>
+
<p>Jean de l'Ours, avec la poign&eacute;e de son sabre,
+
ouvrit le deuxi&egrave;me cabinet et au m&ecirc;me instant une
+
belle demoiselle en sortit. Le g&eacute;ant l'embrassa, lui prit
+
son mouchoir, et la fit remonter comme sa soeur.</p>
+
<p>Avan&ccedil;ant vers le troisi&egrave;me cabinet,
+
devant lequel le vieillard venait de s'adosser, Jean de l'Ours dit
+
encore &agrave; celui-ci &laquo; Qu'est-ce que tu fais
+
l&agrave; ? &raquo; Puis apr&egrave;s une nouvelle
+
sommation suivie d'une derni&egrave;re menace, le g&eacute;ant
+
d&eacute;fon&ccedil;a la porte. Il sortit une
+
troisi&egrave;me demoiselle aussi belle que les
+
premi&egrave;res. Apr&egrave;s l'avoir embrass&eacute;e,
+
son sauveur lui prit son mouchoir et la fit remonter comme ses deux
+
soeurs.</p>
+
<p>Quant au vieillard, qui n'&eacute;tait autre probablement
+
que le g&eacute;nie malfaisant qui tenait en captivit&eacute;
+
les filles du seigneur, il &eacute;tait disparu comme par
+
enchantement.</p>
+
<p>Jean de l'Ours ayant achev&eacute; sa mission eut
+
h&acirc;te de sortir de ce gouffre affreux, il agita sa clochette
+
mais il eut beau sonner, la corde ne lui fut pas descendue. Il se
+
trouva donc dans l'impossibilit&eacute; de sortir de la
+
carri&egrave;re. Pendant qu'il songeait avec amertume &agrave;
+
la trahison de ses deux compagnons, ceux-ci se rendaient au
+
ch&acirc;teau pour y conduire les trois demoiselles.</p>
+
<p>Il y avait tr&egrave;s longtemps que Jean de l'Ours
+
&eacute;tait abandonn&eacute;, et il commen&ccedil;ait
+
&agrave; perdre espoir lorsqu'il aper&ccedil;ut &agrave;
+
ses c&ocirc;t&eacute;s le p'tit ver de terre qui lui dit :
+
&laquo; Ah ! te voil&agrave;, toi ? - Oui, dit Jean de l'Ours.
+
-Tu voudrais bien que je te remonte, sans doute ! Eh bien,
+
voil&agrave; un corbeau ; monte dessus. Voil&agrave; aussi sept
+
boeufs ; chaque fois qu'il va crier : coac, tu vas lui en mettre un
+
dans le bec &raquo;.</p>
+
<p>Tout en montant, Jean de l'Ours, plus r&eacute;solu que
+
jamais &agrave; triompher du nouveau p&eacute;ril devant lequel
+
il s'&eacute;tait d'abord senti impuissant, n'oubliait pas la
+
recommandation du p'tit ver, et chaque fois que le corbeau criait :
+
coac, il lui mettait un boeuf dans le bec.</p>
+
<p>Quand le corbeau eut cri&eacute; sept fois, Jean de
+
l'Ours, qui n'&eacute;tait pas encore remont&eacute;, se dit :
+
Si le corbeau crie encore, je n'ai plus rien &agrave; lui mettre
+
dans le bec, et il est capable de me laisser tomber au fond de ce
+
pr&eacute;cipice dont j'entrevois maintenant le bord. Alors il se
+
coupa un morceau de chair au mollet, et le corbeau ayant encore
+
cri&eacute; : coac, il lui mit ce morceau dans le bec. Au
+
m&ecirc;me instant, d'un coup d'aile, cet oiseau jeta notre homme
+
sur le bord.</p>
+
<p>Jean de l'Ours, sorti de la carri&egrave;re, banda son
+
mollet pour &eacute;tancher le sang de sa plaie et se dirigea en
+
boitant, vers le ch&acirc;teau du seigneur. En route, il rencontra
+
un mendiant. &laquo; As-tu &eacute;t&eacute; au
+
ch&acirc;teau, lui demande-t-il ? -Oui, r&eacute;pondit le
+
mendiant, mais il y a une grande f&ecirc;te, aujourd'hui !- Ah !
+
dit Jean de l'Ours, il y a une grande f&ecirc;te ? - Oui, car le
+
seigneur marie deux de ses demoiselles. - Eh bien, donne-moi tes habits
+
et prends les miens, car je veux aller demander l'aum&ocirc;ne au
+
ch&acirc;teau &raquo;.</p>
+
<p>Le mendiant, tout d&eacute;guenill&eacute;,
+
consid&eacute;rant les habits relativement luxueux de celui qu'il
+
rencontrait, lui demandit : &laquo; Mais, monseigneur, vous voulez
+
vous moquer de moi, bien s&ucirc;r ?- Non, dit Jean de l'Ours, je
+
ne me moque pas de toi ; Tiens, je vais me d&eacute;shabiller en
+
premier &raquo;. Et il donna aussit&ocirc;t ses habits au
+
mendiant qui, en voyant cela, ne refusa pas de lui c&eacute;der les
+
siens.</p>
+
<p>Tout en boitant, Jean de l'Ours poursuivit sa route vers le
+
ch&acirc;teau. En y arrivant, il demanda &agrave; entrer dans
+
la cuisine pour se reposer et y panser sa jambe. Mais les servantes et
+
les valets voyant les haillons de ce malheureux, le
+
repouss&egrave;rent en lui disant : &laquo; Revenez une
+
autrefois car notre seigneur marie ses demoiselles aujourd'hui.- Ah !
+
Monseigneur marie ses demoiselles, je voudrais bien lui parler, moi ! -
+
Ca n'se peut pas, lui r&eacute;pliqua-t-on, monseigneur est avec sa
+
famille et ses invit&eacute;s, tout occup&eacute; de la
+
f&ecirc;te, et il ne va pas quitter sa
+
soci&eacute;t&eacute; pour s'entretenir avec vous. -Eh bien,
+
dit le faux mendiant, conduisez-moi dans sa salle, parce que j'ai
+
absolument besoin de lui parler.- Ca n'se peut pas ! lui fut-il
+
r&eacute;p&eacute;t&eacute; encore. Comment voulez-vous
+
qu'on vous pr&eacute;sente &agrave; monseigneur en ce moment
+
avec votre sale accoutrement et votre piteuse mine ? &raquo;</p>
+
<p>Jean de l'Ours, qui commen&ccedil;ait &agrave; perdre
+
patience, s'&eacute;cria : &laquo;Ah ! vous ne voulez pas me
+
recevoir au ch&acirc;teau ! Eh bien j'y entrerai malgr&eacute;
+
vous ! &raquo; Voyant son insistance et l'air mena&ccedil;ant
+
qu'il venait de prendre, les serviteurs jug&egrave;rent prudent de
+
pr&eacute;venir leur ma&icirc;tre et lui
+
rapport&egrave;rent ce qui venait de se passer.</p>
+
<p>Le seigneur, &eacute;tonn&eacute; qu'un malheureux de
+
cette esp&egrave;ce s'ent&ecirc;t&acirc;t &agrave; lui
+
parler, donna ordre de le faire entrer &agrave; la cuisine.</p>
+
<p>Jean de l'Ours alla s'asseoir au coin du feu,
+
&eacute;tendit, sur chacun de ses genoux, deux des mouchoirs qu'il
+
avait pris aux demoiselles et fixa le troisi&egrave;me sur sa
+
poitrine.</p>
+
<p>A ce moment, les trois demoiselles pass&egrave;rent ;
+
apercevant le mendiant, elles remarqu&egrave;rent avec surprise les
+
mouchoirs qu'il avait &eacute;tal&eacute;s devant lui. L'une
+
d'elles dit &agrave; ses soeurs : &laquo; Ce doit
+
&ecirc;tre l'homme qui nous a tir&eacute;es de la
+
carri&egrave;re, car je reconnais mon mouchoir sur sa poitrine ?
+
&raquo; Celles-ci r&eacute;pondirent qu'elles reconnaissaient
+
aussi les leurs. Les compagnons de Jean de l'Ours qui, &agrave; la
+
suite des demoiselles, s'&eacute;taient introduits dans la cuisine,
+
ressentirent un trouble immense et se dirent l'un &agrave; l'autre
+
: Ce doit &ecirc;tre lui ! pourtant il est impossible qu'il ait pu
+
sortir du pr&eacute;cipice.</p>
+
<p>Alors Jean de l'Ours, qui observait leur attitude,
+
s'&eacute;cria : &laquo; Je crois que vous me reconnaissez,
+
vous autres. Vous savez qu'il nous avait &eacute;t&eacute;
+
promis &agrave; tous les trois que nous &eacute;pouserions les
+
filles du seigneur si nous les d&eacute;livrions de leur
+
captivit&eacute;. Vous savez que c'est moi seul qui ai pu tirer du
+
vin dans le ch&acirc;teau abandonn&eacute;, que c'est encore
+
moi seul qui suis descendu dans la carri&egrave;re pour
+
d&eacute;livrer ces demoiselles, car vous &eacute;tiez
+
incapable de les sauver ; sans moi, elles seraient encore
+
prisonni&egrave;res au fond du gouffre maudit. Jaloux de ma
+
puissance, vous avez cru que je ne pourrais en sortir sans votre aide,
+
et vous m'avez abandonn&eacute; l&acirc;chement pour profiter
+
seuls de la promesse qui nous a &eacute;t&eacute; faite
+
&agrave; tous les trois. Me voil&agrave;, pourtant, et je viens
+
&agrave; mon tour r&eacute;clamer la r&eacute;compense que
+
je m&eacute;rite. Tant pis pour vous, si ce que j'ai &agrave;
+
dire &agrave; monseigneur le fait renoncer &agrave; vous
+
accorder la faveur dont vous &ecirc;tes indignes ! &raquo;</p>
+
<p>Le seigneur, qui depuis un instant &eacute;tait
+
entr&eacute; dans la cuisine, avait entendu tous les reproches que
+
Jean de l'Ours adressait &agrave; ses compagnons. Il leur demanda
+
si ce qu'il venait d'apprendre &eacute;tait vrai. Ceux-ci, remplis
+
de confusion et ne sachant quoi r&eacute;pondre pour se justifier
+
de leur crime &agrave; l'&eacute;gard de celui qui avait
+
d&eacute;livr&eacute; les demoiselles, ne purent contredire ses
+
d&eacute;clarations.</p>
+
<p>Alors le seigneur, irrit&eacute; de l'odieuse conduite de
+
ceux qui avaient &eacute;t&eacute; sur le point de devenir ses
+
gendres, ordonna &agrave; ses serviteurs de les encha&icirc;ner
+
et de les jeter dans la carri&egrave;re, ce qui fut
+
ex&eacute;cut&eacute; sans retard. Ayant fait rev&ecirc;tir
+
Jean de l'Ours de magnifiques habits, il lui accorda la main de sa
+
fille a&icirc;n&eacute;e. Quant aux deux autres demoiselles
+
elles &eacute;pous&egrave;rent de riches seigneurs des environs
+
qui s'&eacute;taient empress&eacute;s de leur faire la cour.<br>
+
</p>
+
<p>Source :</p>
+
<p>Quatre contes populaires recueillis dans le Pays d'Auge par M.
+
Leroy instituteur et publi&eacute;s en 1902 dans Le Pays normand,
+
revue mensuelle illustr&eacute;e dirig&eacute;e par
+
L&eacute;on Le Clerc (Honfleur : Imprimerie-Librairie Satie, 12 rue
+
de la R&eacute;publique, R. Sescau, successeur).<br>
+
Pimpernelle ; La sotte bonne femme ; Les trois bossus ; Jean de l'ours.
+
Saisie du texte et relecture : M. Dubosq pour la collection
+
&eacute;lectronique de la Biblioth&egrave;que Municipale de
+
Lisieux (16.XI.2000)<br>
+
Adresse : Biblioth&egrave;que municipale, B.P. 27216, 14107 Lisieux
+
cedex<br>
+
-T&eacute;l. : 02.31.48.66.50.- Minitel : 02.31.48.66.55. - Fax :
+
02.31.48.66.56<br>
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M&eacute;l : bmlisieux@mail.cpod.fr, [Olivier Bogros]
+
bib_lisieux@compuserve.com<br>
+
http://www.bmlisieux.com/<br>
+
Diffusion libre et gratuite (freeware) Orthographe et graphie
+
conserv&eacute;es. Texte &eacute;tabli sur l'exemplaire de la
+
biblioth&egrave;que (BmLx : norm 430). <br>
+
</p>
+
<p>&nbsp; </p>
+

Version du 11 janvier 2012 à 15:38

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